Pourquoi je n’ai pas écrit pendant plus de 3 mois…

Demain dès l’aube…

J’ai appris ce poème de Victor Hugo dédié à sa fille Léopoldine lorsque j’étais à l’école primaire. C’est un poème d’une infinie tristesse, il explique le long processus de deuil, le manque de la personne disparue, et Hugo nous y parle du chemin qu’il va parcourir pour aller sur la tombe de sa fille bien aimée.

Je connais encore ce poème par cœur, malgré toutes les années passées, et il a résonné en moi ces trois derniers mois.

« J’irai dans la forêt, j’irai par la montagne… Je marcherai, les yeux fixés sur mes pensées, sans rien voir au dehors, sans entendre aucun bruit. Seul, inconnu, le dos courbé, les mains croisées. Triste, et le jour pour moi sera comme la nuit. »

Enfant, je n’avais perçu de ces vers que leur beauté et le désespoir d’un père qui pleure son enfant. Aujourd’hui, j’ai compris que ce texte est une métaphore du travail de deuil. Car oui, c’est vrai, le deuil est un chemin, une route qu’on emprunte seul et qu’on doit gravir étape par étape, parce que c’est la vie, parce que c’est comme ça…parce qu’on doit apprendre à vivre avec sa tristesse et à l’apprivoiser comme une vieille amie, marcher main dans la main avec elle en la regardant avec tendresse, sans douleur et sans larme.

J’ai perdu mon papa, juste après le jour de l’an, par un froid matin de janvier, à cause d’une sale grippe qui l’a affaibli plus que son corps fatigué ne pouvait le supporter. Il nous a quittés un matin gris, moche, terne, un matin qui a été pour beaucoup de gens un début de week-end, le premier week-end de l’année 2025, et qui pour moi a été un samedi à marquer d’une croix blanche, comme une croix de cimetière.

Je ne me lamenterai pas sur cette étape de vie, mon propos n’a pas pour but de vous faire verser une larme. Je voulais juste expliquer pourquoi je suis restée silencieuse pendant trois mois.

A Christmas carol inachevé…

Je vous ai laissés avec un début de conte de Noël, avec le fantôme des Noëls passés, et cette réunion de famille que je chérissais et qui faisait partie de mes souvenirs d’enfant. Je n’ai pas trouvé le courage d’écrire pour parler du fantôme des Noëls présents ni du fantôme des Noëls futurs, et pourtant je n’ai pas pour habitude de ne pas terminer mes textes. Seulement, cette fois les mots m’ont manqué ; les mots, l’envie, l’imagination, et le plaisir d’écrire et de créer.

Terminer ce conte de Noël n’avait plus de sens, déjà parce que Noël était passé, et surtout parce qu’un nouveau fantôme avait pris sa place dans la famille de « mes disparus », et qu’il fallait que je l’accepte pour reprendre des forces. Ma fatigue était aussi lourde que le rocher de Sisyphe, et chaque nouvelle journée me réclamait des forces que je peinais à trouver.

C’est la première fois que je me suis retrouvée à court de « créativité ». Comme si la source s’était tarie, que le flot des mots refusait de couler, et que les idées ne voulaient plus venir.

J’ai pourtant un roman à terminer ! Des articles de blog à écrire (c’est l’engagement que j’ai pris avec moi-même en démarrant ce site sur WordPress !), et des tonnes d’histoires à inventer !

La création, ou comment l’inspiration se nourrit du quotidien

Photo de mon bureau dans mon château en Roumanie ! (non, évidemment tout est faux !).

J’ai écrit mon premier roman à une époque où j’étais relativement désabusée par rapport à mes aspirations artistiques, le second a été rédigé à un moment de ma vie où les difficultés et les injustices s’enchaînaient, si bien qu’il transpire la colère et une forme de rage contenue que je peinais à maîtriser. Mon troisième roman est d’un cynisme glacial, il reflète la vision du monde que j’ai des derniers temps. Quels que soient les textes que j’écris, je me nourris de ce que je vis au quotidien, de mes émotions, de l’énergie qui m’entoure, et des actualités aussi. Est-ce qu’il faut être dans le mouvement pour créer ?

En ce qui me concerne, la réponse est « OUI ». J’ai besoin de la vie, du mouvement, des saisons, de la frénésie du quotidien autant que du calme des jours de repos ou des soirées passées à se détendre. Je peux avoir une idée en observant le ciel, un passant, une page de journal, n’importe quoi en fait !

J’ai eu l’idée de mon premier roman en lisant La peau de chagrin, de Balzac, puis en m’intéressant au mythe de Faust. J’avais cette envie d’écrire, mais en même temps, je ne me sentais pas sûre de moi. Ecrire un premier roman c’est un peu comme se lancer dans un marathon sans être vraiment préparé. On a envie d’aller au bout mais on n’est pas certain de le terminer (Note à moi-même : ne pas m’inscrire à un marathon, mon dos n’ira même pas au bout de la prépa !). Et du coup je me suis mise à rêver à un sort qui permettrait à un auteur désabusé de parvenir à écrire sans problème (et à avoir du succès en prime !). Voilà comment est né Mano Scritta, mon premier roman, paru aux éditions Les Nouveaux Auteurs. Je ne vous en dirai pas plus sur l’intrigue. C’est un ouvrage qui n’est plus disponible à la vente, mais que j’espère bien voir revivre un jour dans une autre maison d’édition.

Mon second roman a germé un matin d’été, je m’en souviens très bien. Je suis tombée sur un article de journal qui parlait des îles du Salut, en Guyane. Au début, pas forcément de déclic. On y parlait des trois îles qui avaient été la dernière demeure d’un nombre impressionnant de bagnards, et l’article évoquait la désolation des lieux, abandonnés depuis à la nature et aux tempêtes de l’océan Atlantique. C’est une photo en noir et blanc qui a éveillé mon imagination, une photo de palmiers légèrement penchés sous l’effet du vent, un cliché qui ne racontait rien de particulier. Mais pour moi, cela a été suffisant. En regardant cette photo, je me suis dit : je vais faire une histoire avec ça ! Je vais parler des bagnards, de ces îles, et je vais inventer une histoire qui va se passer dans ces lieux hantés par les fantômes de ceux qui y sont morts indignement. Je m’intéressais alors aux tueurs en série et à leur psychologie, je passais des heures sur un site qui est une vraie mine d’or en la matière et que je vous conseille si le sujet vous intrigue. Il s’agit de https://www.tueursenserie.org/. Et voilà comment s’est enclenchée la machine : une île au large de la Guyane, un tueur en série, et une histoire qui s’écrit petit à petit, à coups d’idées fulgurantes, de réflexions longues et intenses, bref, d’un travail de longue haleine qui m’a pris pas mal de temps. Ce second roman, L’île des condamnés, est disponible aux Éditions Plumes de Marmotte (https://www.plumesdemarmotte.com/), et bien sûr je vous le conseille vivement !

Le syndrome de Renfield, mon troisième roman.

J’ai eu l’idée de mon troisième roman en me promenant dans Paris, non loin de chez moi. Je ne sais plus si c’était au printemps ou en automne, peu importe ! J’étais avec mon mari, nous étions en balade sur l’île Saint-Louis ; il faisait nuit. Et voilà qu’au détour d’une rue, j’ai cru avoir changé de siècle en à peine dix secondes. Au rez-de-chaussée d’un vieil immeuble haussmannien, j’ai vu quelque chose d’intrigant et qui a aussitôt mis en branle mon imagination. Là, sous mes yeux, se trouvait une pièce figée dans une époque révolue, une pièce venue tout droit du 17ème siècle, avec ses tentures, ses dorures, et même des toiles d’araignée ! Qui donc pouvait vivre dans ces lieux ? … Mais un vampire voyons ! Cela ne pouvait être qu’un vampire !

Et voilà de nouveau la machine lancée à pleine vitesse : « je veux faire une histoire à partir de ce lieu si étrange. » Et je me mets à faire mes recherches, comme d’habitude, parce que oui, mon processus créatif inclut toujours un long travail de recherches. Non pas que je les utilise toutes, loin de là, mais elles me permettent de me créer un univers, une ambiance, de me plonger dans l’atmosphère que je veux transmettre par mes mots. Et je pense alors à un tueur qui est vraiment très très particulier, et je me jette à l’eau ! Plouf !

Et vous n’en saurez pas plus pour l’instant. Je peux juste vous dire que c’est une histoire que je trouve excellente, que je pense que j’ai fait des progrès en matière d’écriture, et que le texte est bientôt terminé. Avis aux maisons d’édition qui seraient volontaires pour parier sur un thriller fantastique sombre, je vous attends !

En guise de conclusion

Alors voilà, je suis arrivée à la fin de cet article de blog, et vous aussi si vous avez lu jusque-là. J’ai eu du mal à entamer ce texte, à me remettre à écrire, à aligner les mots, à parler de moi, ce que je ne fais quasiment jamais lorsque j’écris (ou alors de manière tellement détournée que je vous mets au défi de retrouver ce qui me révèle et ce qui appartient à la pure fiction !). Mais j’y suis parvenue, et je suis heureuse d’avoir retrouvé ma plume. La création est capricieuse, elle se nourrit de nos vies, de nos émotions, de nos joies et de nos peines. C’est parce que nous ressentons que nous pouvons créer et transmettre des émotions. J’ai voulu me couper de tout cela pour mieux traverser ces derniers mois, mais je réalise que j’ai besoin de ressentir sous peine de m’étioler.

Je vous remercie de m’avoir accompagnée dans ce trajet de retour à l’écriture. Je vous promets solennellement que je n’attendrai plus trois mois pour faire vivre ce blog. À très vite, pour un avis sur un livre que je viens de terminer ! Bye ! Béa

Mon petit papa.


Commentaires

2 réponses à « Pourquoi je n’ai pas écrit pendant plus de 3 mois… »

  1. Avatar de Myriam Deloison
    Myriam Deloison

    Coucou, merci pour cet article.

    il est vrai que le travail de deuil est une étape difficile mais nécessaire. C’est un peu comme une course en solitaire autour du monde à un moment où le vent a décidé de ne plus souffler… Je te souhaite de trouver le chemin vers la paix intérieure.

    En ce qui concerne ton nouveau roman, tu sais que Plumes de Marmotte a rouvert ses soumissions ? Je dis ça, je dis rien 😉

    Bonne journée , bises !

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  2. Avatar de nicolefronton
    nicolefronton

    Très belle analyse des sentiments ressentis après ce deuil très éprouvant et pas facile à gérer, je connais ces sentiments après le décès de ma mère il y a 7 ans et ressent tjrs un grand vide, du courage pour faire face au quotidien, le temps fera son œuvre.

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